Que signifie Tout le saint-frusquin ?
“Tout le saint-frusquin” signifie d’abord “Tout ce que l’on possède“. Et lorsque l’expression est employée sous la forme “et tout le saint-frusquin“, cela vient en général après une énumération et signifie “…et tout le reste“.
Quelle est l’origine de l’expression ?
Walther von Wartburg, dans son “dictionnaire étymologique de la langue française”, indique que le mot “frusquin” est employé en argot déjà en 1628 pour désigner les habits, les hardes (vêtements usagés et misérables) d’où le mot “frusques” encore employé aujourd’hui pour des vêtements de peu de valeur (1).
A partir de 1695, “frusquin” désigne encore certes les vêtements (les “nippes“) mais également “ce qu’on a d’argent …. et l’avoir en général” (2).
D’autre part, dans son dictionnaire universel (1690), Antoine FURETIERE nous donne la définition de Saint-Crépin : “Tous les outils du cordonnier et figurément les biens d’un pauvre homme” (3).
Ceci expliquerait comment, au 18ème siècle, on est passé de “Frusquin” (ce que l’on possède) à “Saint-Frusquin” par analogie avec “Saint-Crépin” (1).
D’ailleurs, dans son dictionnaire de la langue verte (1867), Alfred Delvau nous met sur la piste de ce qui pourrait être l’une des premières utilisations de l’expression “Saint-Frusquin” au 18ème siècle. “Elle n’est pas d’hier” dit-il. Et il l’attribue à Vadé (4).
Après recherche il s’avère qu’on la trouve effectivement dans la chanson populaire “Dans les gardes françaises – Plaintes grivoises” publiée pour la première fois en 1760 et dont l’auteur serait jean-Joseph VADE (1720-1757) :
“j‘étois parfois trop bête
d’aimer ce libertin
qui venoit tête à tête
manger mon saint-frusquin”
Vous l’aurez compris, tout comme Saint-Glinglin, Saint-Frusquin n’est donc pas un “vrai” Saint, il n’a pas sa date dans le calendrier mais on y fait encore souvent référence, c’est ainsi qu’il se “saint-gularise”.
Malgré cette singularité, un livre récent de Arnaud Vander s’intitule toutefois “L’évangile selon Saint-Frusquin“. On y retrouve une collection d’aphorismes dignes de Pierre Dac, Raymond Devos et Pierre Desproges. En voici quelques exemples :
“Plus je grossis plus je m’aigris”
“Après nos ébats dans le foin, elle m’a mis sur la paille”
“le bigame a des lunettes à double foyer”
“Ne confondez pas pilote d’essai et chauffeur de corbillard”
Autres expressions de grand-mère ?
Un mot sur notre illustration
Nos sources :
(1) Dictionnaire étymologique de la langue française – Quadrige/PUF (2012) – “Frusquin” & “Frusques” page 279 – Oscar Bloch & Walther Von Wartburg
(2) Französisches Etymologisches Wörterbuch (FEW) – “Les hardes” – Volume 21 – Page 508 – Walther von Wartburg
(3) Dictionnaire universel – Chez Arnout et Reinier Leers, La Haye et Rotterdam – Tome 3 (1690) – “Saint” page 467 – Antoine Furetière
(4) Dictionnaire de la langue verte – E.Dentu éditeur, Paris (1867) – “Frusquin (saint)” page 213 – Alfred Delvau
(5) Chants et chansons populaires de la France – HL Delloye éditeur – Deuxième série (1843)
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