Que signifie Ne faire ni une ni deux ?
Ne faire ni une ni deux c’est agir sans hésiter.
Quelle est l’origine de cette expression ?
Selon ce que suggère notre illustration, nous pourrions être face à un paysage audiovisuel où les chaînes de télévision N°1 (la une) et N°2 (la deux) ne seraient pas autorisées. Et l’expression viendrait donc alors d’une version elliptique de “ne faire (le choix de) ni (la) une ni (la) deux”.
Mais oublions vite cette hypothèse fantaisiste de notre illustrateur car l’origine de l’expression est bien plus ancienne et plus sérieuse.
Vous avez dit ellipse ?
Tout d’abord il s’agirait bien d’une ellipse mais c’est le mot “fois” qui aurait disparu. Donc, la phrase entière serait “ne faire ni une fois ni deux fois”. Mais avant d’en arriver là, le chemin a été long.
Du 17ème au 18ème siècle
- L’expression “Il n’en faut point faire à deux fois” est attestée depuis le 16ème siècle au sens de « Il faut finir tout d’un coup ». C’est ce que nous dit Antoine Oudin dans “Curiositez françoises” (1640).
- L’expression ci-dessus avait même déjà une version elliptique “n’en pas faire à deux”. A titre d’exemple, Montaigne l’utilise ainsi en 1580 : “Ce n’est pas une âme, ce n’est pas un corps qu’on dresse, c’est un homme ; il n’en faut pas faire à deux ” (Les Essais, livre premier, chapitre “De l’institution des enfans“).
- A partir du 18ème siècle, l’expression s’enrichit du “ni ni”. On en trouve un exemple dans “Les mémoires de la Baronne de *** écrits par elle-même” (1740) : “Et puis tout d’un coup, sans en faire ni un ni deux, le velà tombé tout droit à mes pieds.”
- Progressivement, jusqu’à la fin du 18ème, le “ni un” est devenu “ni une”. C’est employé ainsi dans le numéro de Janvier 1786 des “lunes du cousin Jacques” (1786) de Louis Abel Beffroy de Reigny : “Le voilà, qui n’en fait ni une ni deux, et qui m’applique un coup de canne sur l’épaule gauche … d’une force dont on n’a pas l’idée”.
Dernière étape au 19ème siècle
Et au 19ème siècle “n’en” disparaît au profit de “ne”. Un très bel exemple avec “Impressions de voyage” (1838) d’Alexandre Dumas : “On m’ouvrit un appartement où il y avait des tapis partout. Des rideaux de soie, des chaises en velours, un luxe quoi ! Ma foi je ne fis ni une ni deux : je laissai mes souliers à la porte, et j’entrai comme chez moi.”
Puis les exemples furent ensuite très nombreux en littérature.
Voilà donc comment on serait passé de “n’en point faire à deux fois” (17ème) à l’expression actuelle, l’idée principale restant identique : agir sans hésiter.
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