Que signifie Compter pour du beurre ?

Compter pour du beurre c’est ne pas être pris en considération, n’avoir aucune importance.

Quelle est l’origine de l’expression?

Le beurre de l’antiquité au 17ème siècle

Chez les Egyptiens et dans la graisse antique (Euh ! pardon ! la Grèce antique) on utilisait le beurre (“bouturon“) en cataplasme contre les infections de la peau et les brûlures (1). Il avait donc une vocation médicale et garda longtemps cette connotation.

Dans la Rome antique, le beurre (“butyrum“) était utilisé comme une crème pour adoucir la peau (1) ou comme onguent dans les bains. On ne s’en servait pas alors en cuisine. Les Romains ne savaient pas le rendre consistant et le laissaient à l’état huileux.

L’influence romaine s’est ensuite étendue en Gaule puis en France. Et, pendant longtemps, on a boudé le beurre en cuisine. Au  Moyen-âge, il était plutôt la graisse des pauvres. Il constituait alors une source de matière grasse beaucoup plus accessible que l’huile (1).
D’ailleurs, selon Edmond Huguet, au 16ème siècle, la locution “de beurre” était une marque de dédain. C’était le qualificatif réservé aux choses ou personnes auxquelles on accordait peu de considération (“vous errez monsieur le théologien de beurre“) (2).

Ce n’est qu’au 17ème siècle que le beurre gagne en popularité. Ainsi il acquiert une connotation positive. D’où, par exemple, les expressions “mettre du beurre dans les épinards” et “faire son beurre“.

Vendre du beurre et compter pour du beurre à la fin du 19ème siècle

Même si l’expression « compter pour du beurre » est née à la fin du 19ème siècle, elle continue à utiliser la signification péjorative du beurre moyenâgeux. Celui qui compte pour du beurre, c’est le vendeur de beurre méprisé et en marge de la société.

Et à propos de vendeur de beurre, Il est intéressant de noter, à la même époque, l’existence de l’expression “vendre du beurre” mentionnée dans le Dictionnaire étymologique et explicatif de la langue française (1886). L’auteur, Charles Toubin, explique que c’est “assister à un bal en parlant d’une femme et ne recevoir aucune invitation à danser“. Et il ajoute que c’est une “Allusion aux marchandes de beurre assises patiemment en attendant les acheteurs qui ne se présentent pas toujours“. (3)

Tout ce qui précède présente une certaine logique. Le beurre représentait initialement peu de valeur. Le vendeur de beurre n’avait donc pas plus de considération. On pourrait même s’aventurer à affirmer qu’il comptait “pour de beurre” (rien ou pas grand chose). Ce qui serait devenu finalement “pour du beurre”.

Jeu de fillettes?

Dans “La puce à l’oreille, les expressions imagées et leur histoire”, Claude Duneton avance une hypothèse : l’expression viendrait d’un jeu de fillettes où une comptine déterminait le choix des participantes. Et celle sur qui tombait le terme “beurre” fatal et final était laissée pour compte (5).
D’ailleurs, il y a encore peu, il n’était pas rare d’entendre les gamins dire “ça compte pour du beurre” en parlant d’un jeu où l’on débutait par un coup pour rien (qui ne compte pas).

L’un des premiers exemples de l’expression en littérature

L’un des premiers exemples de l’expression en littérature à la fin du 19ème siècle se trouve dans “Le voyage d’Urien” (1892) d’André Gide : “J’allais oublier la grandmère; – elle joue aussi, mais comme elle ne voit plus les jetons, on dit tout bas qu’elle compte pour du beurre.(4)

Comté pour du beurre ?

Pour terminer sur une note humoristique, mentionnons que Stéphane De Groodt a sa propre définition de “compter pour du beurre “

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Nos sources :

(1) lanutrition.fr – “petite histoire du beurre”
(2) Dictionnaire de la langue française du 16ème siècle – librairie ancienne Edouard Champion Paris (1925) – Tome 1 – Edmond Huguet – “beurre page 567
(3) Dictionnaire étymologique et explicatif de la langue française – Ernest Leroux, Paris (1886) – Charles Toubin – Page 127
(4) Wikisource – Le voyage d’Urien (1892) – André Gide – Page 173
(5) La puce à l’oreille, les expressions imagées et leur histoire – Denoel (2005) – Claude Duneton – “compter pour du beurre” pages 221-222

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