Que signifie Avoir une peur bleue ?
Avoir une peur bleue signifie Ressentir une peur intense
Quelle est l’origine de cette expression ?
Collocation
Il arrive d’être confronté à une situation qui vous glace les veines, vous flanque la trouille, vous met les miquettes etc etc …
Avouons toutefois que, dans le cas de cette expression, il est curieux d’associer deux termes qui, en apparence, ne présentent aucun lien sémantique.
Cette association a pour résultat de construire une expression au sens très particulier et plutôt surprenant.
De plus, cette expression est impossible à comprendre en l’absence de tout contexte. Dans ce cas, en langue française on parle de collocation.
Au même titre que “colère noire” ou “nuit blanche”, l’expression “avoir une peur bleue” est bien une collocation (1).
Coloration bleutée
Le rapport entre la peur et la couleur bleue est loin d’être évident.
Toutefois il semblerait qu’une peur intense puisse parfois provoquer une coloration bleutée. Cette dernière se concentre sur les lèvres et le dessous des ongles. La cause en est, dans ce contexte bien précis, un sang appauvri en oxygène, de couleur bleuâtre plutôt que rouge dans les vaisseaux capillaires de la peau (2).
Cette coloration bleutée, dont le terme médical est “cyanose”, était également caractéristique des symptômes du cholera lors de l’épidémie survenue à Paris au début de l’année 1832. Ce fléau a tant frappé les esprits que l’expression “peur bleue” aurait été inspirée par le teint des malades. En effet l’apparition de cette coloration engendrait très certainement la peur de mourir (3).
Peur du blasphème
Il y a également une autre hypothèse pour expliquer l’origine de cette expression (4).
Cela viendrait de l’ancien français. En effet, dans certains jurons, le mot dieu a été remplacé par le mot bleu pour éviter le caractère blasphématoire. Par exemple :
- Parbleu ! = «Par dieu!»,
- Ventrebleu ! = «Ventre (de) Dieu !»
- Sacrebleu ! = «Sacre (de) Dieu».
Par analogie “Peur bleue” viendrait donc de “peur (de) Dieu“.
Premières utilisations de l’expression en littérature
- On attribue souvent la première apparition à l’assommoir” (1876) d’Emile Zola : ” C’était encore pis pour les courants d’air, il en avait une peur bleue …” (5)
- mais, en fait, une recherche avec l’outil Ngram Viewer permet de trouver des utilisations plus anciennes. Notamment dans la revue de Paris (1847) : “Ce qu’il y a de sûr c’est que j’y ai une peur bleue, tout crâne que je suis” (6)
La peur bleue au cinéma
Dans un autre style (fantastique), Stephen King a écrit le roman “Silver bullet” traduit par “Peur bleue” . Ce dernier a été transposé au cinéma sous le même titre en 1985 (7). Un autre film sorti en 1999 portait le même titre
Quelques autres expressions de la peur
- Trembler comme une feuille
- Devenir livide
- Avoir le sang glacé dans les veines
- Frissonner de peur
- Avoir la gorge nouée
- Avoir le trouillomètre à zéro
En ce qui nous concerne, si nous devions choisir une couleur associée à la peur, le blanc et l’expression “être blanc comme un linge” nous semblerait mieux adaptés…. mais les goûts et les couleurs … !!
Autres expressions colorées ?
Un mot sur notre illustration
Nos sources :
(1) cairn.info – revue francaise de linguistique appliquee – Collocations régulières et irrégulières : esquisse de typologie du phénomène collocatif
(2) larousse.fr – cyanose
(3) Histoire du choléra en France : une peur bleue, 1832 et 1854 – Payot, Paris (1987) – Patrice Bourdelais, Jean-Yves Raulot
(4) Trésor de la langue française informatisé TLFi – “Bleu”
(5) wikisource.org – L’assommoir – Emile Zola – Page 329
(6) La revue de Paris – Tome 5ème – La Haye chez les héritiers Doorman (1847) – “le péché mignon” – page 94
(7) allocine.fr – Film Peur bleue (1985)
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.