EHPADE pour mots vieillots – Une nouvelle de Christian Foudel
Avertissement de l’auteur : cette nouvelle utilise des expressions contenant des mots désuets qui ne doivent leur existence dans la langue française que par leur présence dans ces expressions. Lorsqu’une expression a fait l’objet d’une publication détaillée sur savour.eu, un lien est mis à disposition pour accéder à cette publication.
L’EHPADE des mots D
Le mot “Franquette” était coincé dans le dictionnaire entre le “Franglais” et le “Franquisme”. Et il commençait à sérieusement s’ennuyer et se poser des questions sur son avenir dans la langue française. En effet il ne subsistait à cet endroit du dictionnaire que grâce à un autre mot. Effectivement l’adjectif “bonne” lui était associé et il en était désormais inséparable. Il décida donc de prendre son destin en main. Dans ce cadre, Il eut l’idée d’endosser le rôle d’un personnage prêt à faire le grand saut (de page) pour vivre une nouvelle vie. Et il ne tarda pas à lui trouver un prénom et un nom en faisant preuve d’une créativité hors pair : ce serait Frank Hette !
Mais l’idée ne s’arrêta pas là. En effet ce personnage allait créer une structure d’accueil pour tous les mots qui, comme lui, vieillissaient tristement dans l’oubli et en complète dépendance.
Cet établissement s’appellerait l’EHPADE des mots D (D comme Désuet bien sûr). Et EHPADE serait l’acronyme de “Etablissement Hébergeant des Paroles Anciennes Dépendantes d’Expressions”. Tous les mots souffrant les même maux que lui y seraient accueillis. Ainsi, pensa-t-il en parlant de lui à la 3ème personne, ils l’auraient tous à la bonne Frank Hette. Ce jeu de mot dont il n’était pas vraiment fier et qui le ramenait à son attelage forcé avec cet adjectif fit germer en lui une autre idée. Les mots D seraient à priori acceptés dans cet établissement du fait de leur statut. Toutefois ils devraient, eux aussi, s’inventer une nouvelle identité jouant avec les mots mais également les maux que sont pour eux désuétude et dépendance. Un seul objectif : l’admission dans cet établissement à la fois nouveau et des mots D allait permettre à tous de tourner la page.
Trait d’union
L’expression de cette idée fit bonne impression tant chez Robert que chez La Rousse et, très vite, les candidatures affluèrent. La place prise par Frank Hette dans les dictionnaires commença même à empiéter sur celle du Franglais, ce qui n’était pas fait pour lui déplaire.
le premier mot admis à l’EHPADE fut “goguette”. Frank tomba amoureux du personnage dès la première rencontre. Il faut dire qu’il s’agissait d’une superbe jeune femme de type asiatique. Elle se prénommait Hang. Le coup de foudre fut réciproque et il fut tout de suite question de mariage. Hang imposa juste une condition : elle souhaitait garder son nom de jeune fille “Hog”. Après le mariage son nom complet serait donc Hang Hog-Hette. Voilà donc qui lui ouvrait grandement les portes de l’EHPADE. le couple s’y installa et Hang allait pouvoir aider Frank dans la sélection et l’accueil des candidats.
Point de suspension
L’admission suivante fut d’ailleurs celle d’une autre femme prénommée Cathy. En constatant la grande discrétion dont faisait preuve cette candidate, Frank et Hang comprirent très vite à qui ils avaient affaire. Ils crurent en Cathy Mini. Et “Catimini” avait bien sûr sa place dans l’établissement.
Autant Cathy était discrète autant celui qui vint après elle se fit remarquer car il arriva en courant. De plus il se mit immédiatement à courtiser Cathy. Il se prénommait Guy. Frank lui dit alors “Guy, donne moi une bonne raison de t’admettre parmi nous“. Guy lui répondit alors : “c’est simple mon nom est Yedou …. et il court il court le Guy Yedou !” …. “Guilledou Admis !” dit Frank. Et l’union entre Cathy et Guy fut alors officialisée. Elle venait consolider les fondations de l’EHPADE et donner plus de force à l’impulsion initiale donnée par Frank. le processus était bien enclenché. “A présent il n’y aura point de suspension” proclama Frank.
Apostrophes
Et, pour donner raison à Frank, la file d’attente des candidats ne cessait de s’allonger. Il enchaîna donc immédiatement en recevant celle qui était en tête de file. C’était une jeune femme ayant l’air quelque peu indifférente et désabusée. Elle se présenta “Mon nom est Flore Hesse“. Et elle l’apostropha alors sans ménagement. En effet elle ajouta en parlant d’elle à la 3ème personne “et autant vous prévenir tout de suite, si vous ne l’acceptez pas dans votre communauté, elle n’en a rien à faire Flore Hesse” . Voilà un caractère bien trempé qui rencontra un certain succès auprès de Frank et Hang. “Florès” fit donc son entrée à l’EHPADE.
Pendant ce temps là, dans la file d’attente, un autre candidat ne tenait pas en place et apostrophait les personnes qui attendaient derrière lui. Il affirmait qu’il devrait déjà être admis et n’avait pas apprécié qu’on lui demande de rentrer dans le rang. Frank interrogea Hang : “tu le connais ?”. “Non” répondit-elle “mais il m’a déjà dit qu’il s’appelle Hal Acantonade. Il parlait beaucoup, et je lui ai demandè de patienter comme les autres“. Frank sourit et dit à Hang “je pense qu’il joue un personnage pour gagner sa place parmi nous. En effet il parle Hal Acantonade !”. Et voilà comment “cantonade” se mit à rimer avec Ehpade.
Parenthèse
Pour Frank et Hang ce fut le début d’une parenthèse enchantée. Ils allèrent de surprise en surprise en découvrant l’inventivité et la volonté de tous ces mots vieillots de se relancer. C’est ainsi qu’ils accueillirent :
- Un Irlandais couvert d’éloges : Porter O’Pinacl
- Son compère d’un âge avancé : Can O’Nick
- Une jolie femme sur laquelle le temps n’avait pas eu de prise : La belle Lurette
- Un jeune diplômé : Fred Emoulu
- Une femme sympathique et joviale : Joy Heudrille
- Un très attractif Lary Gau dont tout le monde disait “il attire Lary Gau”
- Un certain Pat Achon dont on aimait demander l’avis (“l’avis de Pat Achon“)
- …. et bien d’autres encore qui vinrent peupler le désormais fameux EHPADE pour mots vieillots
Point final
Et tout ce petit monde vieillissant se félicita de se retrouver dans cette communauté Ehpadienne lui permettant finalement de rester à la page après le saut de page initial. De plus, cerise sur le gâteau, “savour.eu, le fameux site où l’on savoure les expressions, lui consacra une page entière. Une nouvelle mettant en scène ces anciens y fut même publiée. Cela mit ainsi un point final à ce voyage dans le monde de la désuétude.
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